Ayant conçu plusieurs générateurs Web (UnTitre, NePas, Motbot…), j’ai été interpellé par un repérage d’Alice Martel.

Avec son générateur de cartels, le Palais de Tokyo ne manque pas d’autodérision 😅
Alice Martel

Sur la page Web de son générateur, le Palais de Tokyo indique :

Vous venez de froncer les sourcils en essayant de comprendre ce qu’est un cartel ? Vous avez déjà ressenti des maux de tête face à une œuvre d’art contemporain en lisant ces petits textes explicatifs souvent alambiqués ? Créez votre propre machine à migraines et testez notre générateur de cartels pour composer le pire que vous n’ayez jamais lu.’‘

Pour générer un cartel, il suffit d’entrer un nom d’artiste et le titre d’une de ses œuvres. Le dispositif web servant de support ludique au glossaire de plus de 60 mots proposé par le centre d’art.

”Ce cartel a été généré automatiquement grâce à une intelligence pas-artificielle et n’a aucun sens, mais les termes utilisés en ont un !”

Carte automatique de muzeodrome

Avant le générateur en ligne du Palais de Tokyo, plusieurs artistes avaient déjà développé des outils pour produire des textes avec ce jargon cryptique. En voici quelques exemples : Le Générateur de Critique d’Art d’Éric Maillet - 2014 (signalé par Alice Martel), le Xyloglossaire artistique de Stefan Ansermet - 2015 (livre objet signalé par Géraldine Miquelot) et le générateur en ligne 500 letters de l’artiste belge Jasper Rigole - 2010.

Dans leur essai «International Art English» (IAE), Alix Rule et David Levine questionnait dés 2012 la langage spécial des textes d’art contemporain :

“Le monde de l’art internationalisé s’appuie sur un langage unique […] Dans ce qui suit, nous examinons certaines des curieuses caractéristiques lexicales, grammaticales et stylistiques de ce que nous appelons l’International Art English. Nous examinons les origines de l’IAE et spéculons sur l’avenir de ce langage à travers lequel l’art contemporain est créé, promu, vendu et compris.”

En 2014, pour aller plus loin, le critique d’art états-unien Danny Olda avait demandé à six artistes de concevoir des œuvres en se basant sur des textes en IAE (texte générés par l’”artybollocks generator”, un générateur Web qui ne semble plus disponible).

“À partir de sujets sélectionnés au hasard, plusieurs déclarations d’artistes différentes sont créées par un générateur de déclarations Internet. Ces déclarations générées sont distribuées aux artistes participants, et les artistes créent à leur tour de nouvelles œuvres d’art basées sur elles.”

Le résultat de cette production inversée avait été présenté en Floride dans l’exposition Machine in the Ghost. Lire à ce sujet, l’article détaillé de Jillian Steinhauer publié à l’époque par Hyperallergic.


{ Article publié dans le n°146 de l’infolettre Muzeodrome - le 14 juin 2024 }