Connaissez-vous ostĂ©ophonie ? Ce phĂ©nomène permet la “propagation du son jusqu’Ă  l’oreille interne via les os du crâne”, il est aussi nommĂ© conduction osseuse.

L’histoire de l’ostéophonie est déjà très longue. Dés le XVIe siècle, “Jérôme Cardan mène des expériences sur le crâne humain et observe que le son peut être transmis à l’oreille grâce à une tige vibrante placée entre les dents.” (source Wikipédia).

Depuis quelques années, la conduction osseuse est dans l’actualité, du coté des appareils auditifs et même du coté de la médiation muséale

InitiĂ© par SĂ©bastien Depertat et Thomas Bonnenfant, Losonnante “a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© par les laboratoires du CNRS PACTE et CRESSON” et il a fallu “ 5 ans de recherches et 4 prototypes” pour l’élaborer. Si cet Ă©tonnant dispositif de mĂ©diation a permis de populariser la conduction osseuse dans l’univers des musĂ©es et expositions, il a eu des prĂ©curseurs. Les artistes ont souvent plusieurs longueurs d’avance…

Questionnant notre engagement envers les objets physiques, l’artiste Markus Kison a Ă©tudiĂ© dans la classe de nouveaux mĂ©dias de Joachim Sauter Ă  l’universitĂ© des arts de Berlin. Dans le cadre de cette classe, il dĂ©veloppe en 2007 l’installation “Touched Echo” pour la ville de Dresde (Allemagne) - une intervention mĂ©diatique minimale dans l’espace public.

“Les visiteurs de la Terrasse de BrĂĽhl Ă  Dresde sont ramenĂ©s dans le temps, Ă  la nuit du terrible raid aĂ©rien qui a dĂ©vastĂ© leur ville le 13 fĂ©vrier 1945. Dans son rĂ´le d’interprète, le visiteur s’imagine Ă  la place des habitants de Dresde qui ont dĂ» se boucher les oreilles de peur pour ne pas entendre le bruit Ă©pouvantable des explosions, il y a 65 ans. Lorsque l’on s’appuie sur la balustrade, le bruit des avions et des explosions est transmis par la balustrade oscillante, Ă  travers le bras, directement dans l’oreille interne.”
Markus Kison

La borne de Lossonante fait Ă©cho Ă  l’Ĺ“uvre crĂ©Ă©e par la gĂ©niale musicienne et artiste multimĂ©dia Ă©tats-unienne Laurie Anderson - une Ĺ“uvre prĂ©sentĂ©e en 1978 au MoMA (New-York).

“ExposĂ©e dans la galerie PROJECTS du MusĂ©e d’art moderne du 15 septembre au 29 octobre, l’installation de Laurie Anderson, appelĂ©e “Handphone Table”, consiste en une simple table en bois de 1,5 m de long dotĂ©e d’un système sonore dissimulĂ© que l’on ne peut entendre qu’en s’impliquant activement dans l’Ĺ“uvre.” CommuniquĂ© de presse du MoMa - aoĂ»t 1978

Laurie Anderson avait réalisé un dessin explicatif où elle décrivait son installation novatrice avec ces termes :

Des haut-parleurs puissants qui compriment et amplifient le son sont intĂ©grĂ©s dans la table. L’auditeur ne peut entendre la source sonore enregistrĂ©e qu’en plaçant ses coudes dans les dĂ©pressions de la surface de la table et en se couvrant les oreilles. Le son est conduit de la bande magnĂ©tique via la vis conductrice, le coude, le crâne. Les cavitĂ©s crâniennes deviennent en fait des haut-parleurs..

Une des ’“Handphone Tables” figure dans la collection du Mac Lyon depuis 1999. Elle a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© lors de la rĂ©trospective de l’artiste proposĂ© par le musĂ©e en 2003.

Grande exploratrice marquée par les narrations, Laurie Anderson a ouvert beaucoup de portes. En conclusion de cette notule, je ne peux n’empêcher de vous inviter à visionner la séquence “Drum Dance” de son magnifique film “Home of the Brave” (1986).


{ Article publiĂ© dans le n°113 de l’infolettre Muzeodrome - le 14 juillet 2022 }