// Entretien avec Mathilde Castel //

J’ai croisé Mathilde Castel pour la première fois à la Sorbonne Nouvelle, à l’époque située rue Santeuil. C’était en septembre 2014, ce jour là je donnais au Master 2 Muséologie et Nouveaux Médias (dit MNM) mon premier cours d’une unité d’enseignement de 48h sur le multimédia.

Bonjour Mathilde, peux-tu présenter rapidement ton parcours ?

Bonjour Omer, dit rapidement mon parcours ressemble à une liste de courses : 3 licences (histoire de l’art, littérature, philosophie), 2 masters (esthétique, muséologie), 1 doctorat (muséologie), 1 DU de docteur-entrepreneur, 6 ans dans une maison de luxe et puis 1 coup de théâtre : je suis en prépa à l’école du Louvre cette année pour passer le concours de conservateur du patrimoine.

Et Les odeurs au musée…

Oui, j’ai oublié ça dans ma liste de courses ! J’ai fait une thèse sur la muséologie olfactive sous la direction de François Mairesse à la Sorbonne. Recherche financée par le laboratoire de parfums de la Maison Cartier pour lequel j’ai travaillé 6 ans (tout se recoupe finalement). Les odeurs sont présentes partout où il y a de la vie, il y en a dans les musées comme ailleurs. On y fait seulement peu attention car on vient surtout au musée pour voir (et pas pour sentir) des choses.

Le spectre des expériences autour des odeurs proposées par les musées semble toutefois souvent limité…

Les musées ont en effet le souci de proposer des expériences de plus en plus immersives, saisissantes, mémorables, et les odeurs sont un formidable outil pour cela. Elles sont cependant complexes à mettre en place et je pense que les institutions sont en train d’apprendre comment bien s’entourer pour concevoir et pérenniser des expériences olfactives dans des espaces d’exposition.

Pourrais-tu nous indiquer deux ou trois exemples de bons usages de l’utilisation des odeurs dans des musées ou des expositions ?

Les meilleurs exemples sont toujours issus d’une collaboration bienveillante entre une institution muséale et des experts du monde du parfum. Je cite souvent le cas de la médiation olfactive du musée international de la parfumerie de Grasse pour l’exposition Fragonard : amoureux et libertin (musée du Luxembourg, 2015). En ce moment j’ai la chance de suivre la conception d’une exposition qui se tiendra à l’IMA sur les Parfums d’Orient. L’équipe constituée pour la création du parcours olfactif me fait penser que le résultat sera superbe.

Des ressources à recommander aux lectrices et lecteurs de Muzeodrome ?  

Je trouve exaltant de réfléchir le musée au travers de sources qui ne sont pas proprement muséales. Je n’ai jamais pris plus de plaisir à concevoir l’espace d’une exposition qu’en lisant La vie : mode d’emploi et Espèces d’espaces de Georges Perec.

Note 1 : En 2018, Mathilde Castel a dirigé l’ouvrage Les Dispositifs olfactifs au musée (Nez éditions). En juillet 2022, elle a publié dans le n°202-203 de la lettre de l’Ocim consacré aux médiations sensibles, l’article Pourquoi le musée devrait-il « faire sentir » ?

Note 2 : L’exposition Parfums d’Orient sera révélée du 25 septembre 2023 au 11 février 2024 à l’Institut du monde arabe - Extrait de sa présentation : “Une exposition singulière, qui donne toute la mesure de l’importance jouée par le parfum dans la culture arabe en faisant ressurgir chez chaque visiteur des souvenirs olfactifs intimes…

Note 3 : En juin 2020, dans le n°32 de l’infolettre, j’avais interviewé Alain Korkos à propos de son inventaire des images contenues dans La vie : mode d’emploi de Georges Perec.


{ Article publié dans le n°124 de l’infolettre Muzeodrome - le 21 mars 2023 }